Enfin...

Publié le par filou-from-mars

Pour ainsi dire, les choses ne se sont pas vraiment passées comme j’aurais voulu.

Oh bien sûr le vol depuis Charles de Gaule était bien à l’heure, mon siège bien numéroté, la place pour les jambes standardisée donc largement insuffisante pour les miennes, les barquettes de nourriture ont rempli leur fonction de gavage…de ce côté-là, rien n'a été différent de ce qu’on doit attendre d’un vol long-courrier. ette impression de vulgarité de traverser la planète d’un seul coup m’est revenue comme un an auparavant alors que nous quittions Tahiti après notre périple d’un an. Comment accepter que ce qui nous avait pris un an puisse se faire en un jour ? Comment accepter que tous ces paysages, des côtes marocaines, aux falaises de Madère, des îles désertes du Cap Vert aux eaux brunes de le baie de Salvador, du canal de Panama au lagon des atolls polynésiens puissent se confondre à 10 000 mètres d’altitude en une grande étendue presque homogène où la traversée d’un continent se fait le temps d’un somme ?

Non Madame, malgré votre douce voix, je ne peux pas vous remercier et attester que nous avons fait un agréable voyage en compagnie d’Air France. Seule consolation, nous allons dans quelques heures retrouver notre voilier, Filou, laissé attaché à sa bouée pendant un an comme un chien à la poubelle d’une aire d’autoroute les jours de grands départs. Nous t’avons abandonné, pensant te vendre, toi qui ne nous avais pourtant pas fait défaut de Marseille à Papeete.

Débarqués à 5h45 du matin sur le tarmac de l’aéroport international de Faaa, j’accoste aussitôt sorti le premier pick up qui passe. « Tu vas vers la marina Taïna ? ». Je reprends aussitôt les habitudes locales dont le tutoiement spontané fait partie. Nous voilà donc Laurène et moi, nos 6 sacs et leur 170 kg, quelques bouteilles de bon vin achetées au dernier moment en duty free en route pour rejoindre Filou.

La marina se réveille à peine à notre arrivée. Nous croisons l’impeccable Philippe, directeur de la marina de son état qui rentre de son jogging matinal avant que la chaleur moite rende tout sport inhumain. Devant nos mines pâlottes, nos yeux creusés de fatigue et un certain petit air de cocker, il comprend qu’il est de son devoir de nous aider à rejoindre notre voilier au mouillage avec le bateau de la marina. Nous imaginions déjà devoir gonfler notre annexe et y aller à la rame en 6 allers-retours…

Voilà, il est à peine 7h00, 26 heures après avoir quitté la métropole et nous sommes à bord. Une douce euphorie reprend le dessus. Avant même d’ouvrir le bateau, nous sautons dans l’eau tiède du lagon, heureux de nous prélasser quelques instants après ses longues heures dans une cabine pressurisée. Nous apercevons sur le bateau voisin, nino, fils de luc qui a bien grandi du haut de ses 5 ans à présent. Nous en profitons pour aller les saluer à la nage. Malgré les douze mois écoulés, la même spontanéité se dégage aussitôt. Nous revoilà dans le Pacifique Sud.

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Une odeur de renfermé se dégage à l’ouverture de notre voilier. Quelques marques de moisissures décorent les mains courantes. La grille de la gazinière s’est décomposée en de jolis petits tas de rouille reproduisant les croisillons. Le pont est jonché de fientes de mouettes. Lorsque j’essaie de démarrer le moteur, rien de se passe même pas le petit toussotement d’une tentative infructueuse. Les batteries n’ont pas l’air bien en forme. La barre à roue est bloquée. Le premier sentiment euphorique n’a donc été qu’éphémère. Le Pacifique Sud, c’est aussi une zone très chaude et humide, deux ennemis pour toute notion de conservation…

Filou s’est vengé. Les quatre jours prévus pour réarmer notre voilier vont vite être dépassés. Le bilan est lourd. Moteur et pupitre du pilote automatique HS, fuite de fréon sur le frigo, batteries service et moteur à changer, démarreur à vérifier, connexions électriques de lpompe de toilette bloquée sans parler du carénage qui doit être fait (mise au sec du bateau pour nettoyage de coque, ponçage et peinture), de l’ensemble des voiles à gréer et des bouts à changer…

L’autre paramètre important à mentionner est qu’il est tout sauf évident de gérer ce petit programme au milieu du Pacifique Sud. Ici, tout est loin, tout est cher et rien n’est pressé.

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Voilà comment et pourquoi, Laurène et moi avons passés l’intégralité du mois de mai à poncer, peindre, démonter, remonter, puis re-démonter, commander des pièces en France, en Australie, aux Etats Unis, faire la navette d’un magasin à l’autre, d’un atelier d’usinage ou de bobinage (j’ignorais jusque-là que cela existait…), apprendre ce qu’est un serre-clip, un moteur galette, des pignons satellites, comment se servir d’une pince ampérométrique ou comment sortir un roulement à bille grippé en soudant un axe en son centre. Le tout dans la chaleur lourde de la fin de la saison humide, nous déplaçant uniquement à pied ou en stop, dans les embouteillages qui encombrent Papeete plus de 6 heures par jour sur les douze de soleil.

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Heureusement, la présence de la mère de Laurène et de Laurent ont permis de nous changer les idées en soirée. Nous les rejoignons les mains et T-shirts encore tachés de graisse et de peinture chaque soir pour le diner. J’en profite aussi pour aller faire quelques vols en parapente quand le travail est bloqué par l’attente d’une livraison. Le club est toujours aussi actif et la vue sur le lagon imprenable depuis mon aile. Nous revoyons aussi quelques connaissances aperçues l’année passée autour des bières du Casa Bianca. Nous croisons aussi avec plaisir les nouveaux internes fraichement arrivés de métropole. Nous avons tout de même eu quelques consolations dans cette ambiance difficile.

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De frustration en persévérance, de petits désespoirs en satisfactions progressives, nous avons finalement pu mettre littéralement les voiles au bout de cinq belles semaines. Notre pilote automatique fonctionne, moins silencieusement qu’auparavant mais il fonctionne. Nous avons à nouveau un système électrique autonome avec des batteries qui se rechargent facilement avec nos panneaux solaires et notre éolienne. Les vieux bouts endurcis par le sel et le soleil sont changés, les haubans vérifiés, les voiles à poste. Le compteur à miles de Filou peut enfin se débloquer.

Quand nous faisons nos premiers bords vers les Tuamotus, nos longues heures d’attente inquiète et de travail sont récompensés.

Pour ainsi dire, les choses ne se sont pas vraiment passées comme j’aurais voulu mais ça y est nous reprenons notre route…

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Note de la rédaction: Les photos semblent indiquer que seul Jean Marc travaillait...loin s'en faut!

 

 

Publié dans Pacifique

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M
coucou mon ex interne préféré et sa petite troupe! je sens que cette nouvelle aventure va encore me passionner...j'attends avec impatience notre Gé qui nous narrera ça;(et oui même les bonnes<br /> choses ont une fin:-)) envoyez le nous en forme bonne continuation bisous
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L
Et hop, je reprends gout à suivre vos aventures via ce blog.<br /> Au plaisir de lire la suite et plein de belles choses à vous d'ici là!
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U
Coucou à tous les deux<br /> Merci pour ces infos sur votre périple qui a commencé difficilement. Bonne navigation.<br /> Donnez des nouvelles à votre arrivée.<br /> Bises<br /> Maman
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